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Loi Agec, la restauration rapide poussée à vite se réinventer autour du réemploi

Publié le 25/12/2021
Alors que le calendrier s’accélère et que malgré le contexte sanitaire, nos dirigeants n’ont pas mis le pied sur le frein sur certaines mesures dont l’interdiction, au 1er janvier 2023 de la vaisselle à usage unique pour la restauration sur place, la branche doit se mettre en ordre de bataille et vite. Nous avons demandé à un expert du secteur de nous éclairer sur les enjeux qui se posent. Spécialisé dans le e-commerce après avoir collaboré sur des projets Tech chez McDonald’s, Nespresso, Orange, L’Oréal, Steeve Broutin, a été cofondateur en 2014 de la startup Rapidle spécialisée dans le click & collect. Depuis septembre, il est Expert Solutions Retail & Agec chez Hub One, filiale du groupe Aéroport de Paris pour porter sur le marché, la solution de traçabilité de la vaisselle réutilisable dans la restauration, la distribution et la vente à emporter/livrer.

La restauration rapide est à un tournant de son histoire, en ce qui concerne la vaisselle à usage unique qu’elle devra abandonner en 2023 suite à la loi Agec, pourquoi et quelles sont les conséquences de cette loi, sur la restauration, et rapide en particulier ? 

Au 1er janvier 2023, les restaurants accueillant plus de 20 couverts en places assises doivent passer à la vaisselle réemployable, c’est une exigence légale et réglementaire mais c’est aussi une demande des consommateurs dont les attentes et exigences en matière de protection environnementale grandit fortement. Dans le même temps, lorsque l’on considère que la restauration rapide, à elle seule, produit, selon l’Ademe, 220 000 tonnes de déchets par an, le transfert vers le réemploi ne peut qu’être une démarche RSE et environnementale positive que les consommateurs apprécieront. 

Mais ce transfert oblige la restauration rapide à se réinventer. Sans plonge en interne, elle envisage soit de s’équiper de tunnels de lavage et d’embaucher du personnel supplémentaire (pas toujours possible) soit de recourir à des prestataires externes (Options par exemple) comme cela se fait dans l’hôtellerie avec le linge. 

Même si cette interdiction à venir est une réalité pour l’usage unique, qu’il soit carton ou plastique, la question des matières premières à utiliser (verre, inox, PP…) fait débat. Pourquoi ?

Plusieurs matériaux sont proposés et ils ont chacun leurs avantages et inconvénients : le verre, hygiénique, mais plus lourd et cassable contre le Tritan ou le PP avec des cycles limités, plus légers mais « abimables ». Les cycles d’utilisation, plus courts avec le PP et le Tritan, posent la question de leur recyclage et des filières associées, de leur coût également. Mais les technologies évoluent vite, très vite… C’est un vrai sujet au croisement des aspects esthétiques opérationnels et économiques dont chaque enseigne fait son apprentissage actuellement. 

Les enquêtes contradictoires s’opposent concernant les cycles de vie entre l’usage unique et le réemploi. Pensez-vous qu’il y a un sujet ?   

Chacun avance ses arguments. Je ne pense pas que le sujet ne soit que « chiffré » : la loi et son décret d’application mettent en mouvement toute une profession souvent critiquée par les déchets qu’elle génère. Cette mutation va lui permettre de « changer de style », avec une montée en gamme qui ne peut que lui servir. La vision que nous avons tous de ces poubelles dans les villes, remplies à ras-bord va certainement disparaître, certaines enseignes le prennent comme une véritable opportunité d’image et commerciale, de montée en gamme pour se différencier. 

Utiliser de la vaisselle en « dur » est de nature à bousculer le modèle même de la restauration rapide. La transition vers le réemploi doit-elle passer par un entretien sur place ou une externalisation ? Quelles modifications implique cette mutation ? 

En ville, pousser les murs risquent d’être compliqué voir parfois infaisable, sans compter les problèmes parfois liés aux contraintes architecturales. Le coût peut paraître aussi important : l’acquisition d’une plonge, l’embauche de personnels supplémentaires…. Recourir à un prestataire extérieur peut s’avérer être une bonne option : transfert du risque, pas de charges fixes, gestion des pics de saisonnalité. C’est en somme un peu la même question lorsque vous faites livrer vos plats par une plateforme ou si vous décidez d’avoir votre propre flotte. Il me semble que le marché sera hybride. 

Migrer vers du réemploi, implique-t-il forcément, la mise en place d’un système de consigne ? Si oui, quelles sont les solutions existantes ? 

Consigner une vaisselle qui n’est pas censée sortir du restaurant peut paraître inutile sauf que… les contenants sont très souvent des véhicules de communication à l’image de la marque et attirent les collectionneurs. Un constat, aussi, assez étonnant dans les tests réalisés : beaucoup de consommateurs jettent leur vaisselle réemployable à la poubelle. Des habitudes qui changeront mais en attendant c’est 25 à 30 % de vaisselle perdue, des coûts que la consigne neutralise en partie. Aujourd’hui l’une des plus actives est par exemple Pyxo positionnée avec une approche de gamification et un business model innovant qui neutralise tout ou partie de l’investissement des enseignes ; ils ont séduit les plus importantes avec leur approche agile et différenciante. Nous trouvons aussi Green GO plus spécifiquement sur la restauration collective avec le développement d’un réseau de collecteurs, un acteur qui étend son influence sur les indépendants. D’autres comme Uzaje, se sont spécialisés sur le lavage et ont quitté la consigne. 

De nombreuses solutions sont en test et impliquent plusieurs briques entre la fourniture du contenant, la gestion de la consigne, l’entretien, la logistique. Comment y voir clair ? Et comment faire si je suis un indépendant, si je suis une chaîne ? 

Les chaînes sont déjà en mouvement ; elles s’organisent car c’est pour elles un enjeu majeur d’image et ce sont des process que les équipes doivent s’approprier, pour lesquels il faut du temps. Pour les indépendants, nous travaillons sur des solutions simples et Plug & Play qui pourront être proposées par des grands distributeurs comme Metro, Transgourmet, … De manière assez pragmatique, quatre questions très concrètes animent les acteurs de la profession :  

  • Quelles vaisselles je choisis et mon fabricant est-il en capacité de me fournir une vaisselle traçable ? Si non, puis-je la tracer moi-même ? 
  • Comment je gère les entrées et les sorties de celle-ci à l’arrivée et au départ du restaurant ? 
  • Comment j’associe un contenant à une commande, à un consommateur ? Quels dispositifs pour m’assurer du retour de la vaisselle dans mon établissement ? 
  • Comment je monétise ce service afin d’en réduire le coût d’investissement ? 

Chez Hub One nous proposons les technologies simples et utilisées pour tracer les bagages ou les colis dans le transport et la logistique, suivre des produits de grande consommation chez nos clients retailler, ou inventorier des stocks pour nos clients industriels. 

Y-a-t-il urgence à traiter le sujet ? Ne risque-t-on pas l’embouteillage au 2e semestre ?

Il reste 1 an, c’est long et très court à la fois et comme d’habitude sur des marchés contraints, les premiers arrivés seront les premiers servis ; l’augmentation des délais sur les matières premières et les composants n’arrangent rien. C’est pour cela que nous engageons les restaurateurs à ne plus perdre une minute et à se préparer en réalisant dès le 1er trimestre des POC ou pilotes pour intégrer, tester et apprendre avant le grand rush de l’année prochaine. Chez Hub One nous avons constitué une équipe d’experts techniques prêts à répondre et nous travaillons avec des partenaires aguerris pour aller vite sur ces sujets parfois complexes à appréhender. 

Pensez-vous qu’après la suppression de l’usage unique sur place, la marche de l’histoire ira vers du réemploi aussi pour la vente à emporter ? Comment s’y préparer ? 

En fait, il y a un vrai enjeu face à ce que sera la demande des consommateurs : une double offre réemployable (en restaurant) et jetable (en VAE et Livraison) pourrait vite devenir une seule offre autour du réemploi. La bagarre de l’image ne sera pas sans effet, et il suffira qu’une marque décide d’en faire une arme de communication pour que toute la profession suive. Mais la difficulté restera le collecteur de vaisselle (en VAE) ou la reverse logistique (en Livraison), plusieurs projets sont à l’étude comme les collecteurs de verre que nous connaissons tous, et qui nous permettront, peut-être demain, de déposer nos vaisselles usagées partout en France.

 Snacking 21/12/2021

 

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