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Arrêté de fermeture administrative

Publié le 02/03/2023

L’arrêté de fermeture administrative d’un commerce est une décision émanant d’un préfet (ou du préfet de police à Paris), ordonnant la fermeture d’un établissement. Ce n’est pas une sanction prononcée par un juge et il n’y a pas besoin de décision judiciaire pour que le préfet en décide.


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La procédure à suivre par l’administration avant de notifier un arrêté de fermeture

Un courrier du préfet doit être envoyé à l’intéressé et contenir les éléments suivants :
- informer la personne concernée des motifs de la mesure qu’il est envisagé de prendre à son encontre ;
- inviter expressément le commerçant à présenter des observations écrites et le cas échéant, orales en lui fixant un délai pour le faire (article L122-1 CRPA).

Cela implique donc de laisser un délai suffisant à la personne concernée pour présenter ses observations. Un délai de 15 jours est généralement admis comme suffisant pour assurer le respect des droits de la défense.

Bien entendu, c’est dès cette première lettre qu’il convient d’avoir recours à un avocat car ce dernier peut vous éviter ou amoindrir une sanction et donc vous éviter de perdre du chiffre d’affaires. C’est même en amont, dès le début du contrôle physique par les agents de la préfecture, de la mairie, qu’il convient d’agir.

Un délai inférieur à 15 jours laissé au commerçant est généralement sanctionné par le juge administratif. Le préfet n’avait pas justifié le caractère bref du délai de 2 jours imparti à l’établissement pour présenter ses observations, mais le juge a validé l’arrêté car le requérant n’a pas établi avoir été dans l’impossibilité de transmettre ses observations dans ce délai, étant donné qu’un mois s’est écoulé entre la mise en demeure d’avoir à présenter ses observations du 23 juin 2021 et l’arrêté de fermeture du 20 juillet 2021, ayant pu par ailleurs être auditionné par la police le 2 juin 2021 (tribunal administratif de Lyon - 7e chambre - 16 décembre 2022 - n° 2106508).

La procédure contradictoire indiquée ne doit pas être obligatoirement respectée dans trois situations :
 - en cas d’urgence ou de circonstances exceptionnelles (article L121-2 CRPA) ;
- dans le cas où la mise en œuvre d’une telle procédure contradictoire serait de nature à mettre en péril l’ordre public ou la conduite des relations internationales (art L121-2 CRPA) ;
- lorsque des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière (art L121-2 CRPA).

Sur quel motif et quelle durée peut être notifié l’arrêté ?

La décision peut se fonder sur : 
Une infraction aux lois et règlements relatifs à l’activité commerciale du commerçant : la durée maximale sera de 6 mois. Dans ce cas, le préfet doit préalablement notifier un avertissement au commerçant. Cet avertissement pourra, au final, se substituer à l’arrêté de fermeture lorsque la défaillance du commerce est exceptionnelle.
Une atteinte à l’ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publique : la durée maximale sera de 2 mois.
La commission d’actes criminels ou délictueux en relation avec la fréquentation de l’établissement ou ses conditions d’exploitation : la durée maximale sera de 6 mois. Dans ce cas, il y a automatiquement annulation du permis d’exploitation du fait de la notification d’un arrêté de fermeture (article L3332-15 du code de la santé publique).

Le ministre de l'Intérieur peut, dans les cas 1 et 3, prononcer la fermeture de ces établissements pour une durée allant de 3 mois à un an, mais la durée de la fermeture prononcée par le représentant de l'État dans le département s'impute sur celle de la fermeture prononcée par le ministre et ne s’ajoute pas (article L3332-16 du code de la santé publique).
Lorsque, du fait d’un manquement aux règles sanitaires ou d’hygiène, un établissement présente ou est susceptible de présenter une menace pour la santé publique, le préfet peut également ordonner sa fermeture en enjoignant des travaux à faire. Ainsi, le commerce restera fermé jusqu’à ce que l’exploitant ait terminé les travaux et autres mesures prescrits (exemple : souris présentes dans l’établissement, formation du personnel à l’hygiène non-effectuée, dates limite de consommation non respectées…).

En outre, le préfet peut même empêcher l’accès des lieux, par exemple d’un hôtel, aux occupants (locataires de l’hôtel) tant que les travaux prescrits n’ont pas été faits (article 1331-22 du code de la santé publique). Il peut même écrire au parquet pour demander l’ouverture d’une enquête pénale (exemple : pour soumission de personnes en situation de vulnérabilité à des conditions logements incompatibles avec la dignité humaine, mise en danger de la vie d’autrui) et à titre conservatoire, la saisie des loyers versés par les occupants de l’hôtel sur le compte bancaire de l’exploitant qui devra être validée par le juge des libertés du tribunal judiciaire.

Si les travaux prescrits doivent être réalisés par l'exploitant, celui-ci peut demander au bailleur de les réaliser ou il peut le faire lui-même et demander le remboursement au bailleur, qui n’a pas délivré un local conforme à l’activité prévue au bail (par exemple, un local commercial sans conduit d’extraction conforme alors que le bail prévoit l’activité de restauration).

Cette règle vaut ainsi dans le cadre des relations entre le bailleur et le locataire commercial et également dans le cadre des relations entre locataire-gérant et propriétaire du commerce.
Il convient donc de rechercher l’origine des infractions reprochées par l’arrêté de fermeture administrative, pour savoir à qui en incombe la charge. Ainsi, la cour d'appel de Paris a condamné un loueur du fonds de commerce à rembourser à l'exploitant locataire-gérant le montant des travaux réalisés qui lui incombent, en vertu de son obligation de délivrer au preneur la chose louée et de l'entretenir en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée. En l'espèce, l'activité ne respectait pas la réglementation en vigueur notamment en raison de la non-conformité des locaux sur le plan de l'hygiène. La non-conformité des locaux est en principe de la responsabilité du loueur au titre de son obligation de délivrance, tandis que la violation des règles sanitaires de conservation et de traitement des aliments est de la responsabilité du locataire-gérant exploitant (CA Paris, 10 avril 2019, n° 17/11987).

Les exemples les plus fréquents de cause de fermeture

Ce sont les cas de : 
- violences dans l’établissement ou même aux abords, par ou entre des clients ou/et le personnel ou les gérants du commerce ;
- ivresse manifeste d’un client (ou du personnel) dans l’établissement ou à l’extérieur suite à vente d’une quantité excessive de boissons alcoolisées par le commerce ;
- vente d’alcool aux clients sans licence adéquate résultant d’une convention de translation de licence IV signée mais d’absence de validation par le bureau des licences ;
- tapages nocturnes ou nuisances sonores et/ou olfactives répétées ;
- port d’arme par un client ou un agent de sécurité de l’établissement sans autorisation avec ou sans tirs de coups de feu ;
- présence de nuisibles (rats, cafards, blattes…) dans un commerce de restauration ;
- préparation de plats dans les caves de l’établissement où sont entreposés des denrées alimentaires ou des plats préparés et entraînant un risque pour la santé des clients ;
- non-respect des horaires de fermeture ;
- non-conformité des locaux ou du matériel de l’établissement ;
- travail dissimulé : il peut être constitué par exemple par une absence de déclaration préalable à l’embauche (DPAE) et de fiches de salaires, par la réalisation d’heures supplémentaires non déclarées, ou tout simplement le fait de ne pas inscrire le nom des salariés sur le registre unique du personnel (exemple : CE, 16 octobre 2018, n° 424480) ;
- travail illégal : emploi d’étrangers non-ressortissants de l’Union européenne sans autorisation de travail ou avec une seule autorisation de travail d’un autre pays de l’Union européenne ;
- le fait de laisser pénétrer des prostituées dans des chambres d’hôtel en toute connaissance de cause et d’en tirer profit ;
- organisation de parties de poker par l’établissement sans y être autorisé ;

La plupart des cas de fermeture sont susceptibles d’entrer dans les trois motifs. L’appréciation se fera par la préfecture en fonction de la gravité des faits. Ainsi, les cas de fermeture administrative sont très larges.

S’opposer à la fermeture

Une fois la sanction prise, un avocat doit introduire un recours contre l’arrêté de fermeture car les arguments à développer sont avant tout juridiques et très spécifiques.

Le recours peut être gracieux devant le préfet qui a pris la décision ou hiérarchique devant le ministre de l’Intérieur. Cela peut aussi être un recours pour annuler l’arrêté devant le tribunal administratif dans un délai de 2 mois à compter de la notification de l’arrêté et même obtenir des dommages-intérêts. Cependant, malgré ces recours, le commerce devra appliquer immédiatement cet arrêté et fermer son établissement, ce qui occasionne une perte de chiffre d’affaires.

Le recours judiciaire est très long et la procédure dure un à deux ans. Le plus souvent, lorsque l’exploitant va recevoir sa convocation devant le tribunal, la fermeture aura déjà été appliquée.

C’est la raison pour laquelle deux procédures d’urgence permettent de suspendre la fermeture : 
un référé-liberté, en cas d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, en l’espèce la liberté du commerce. Il doit être introduit dans un délai extrêmement bref. Le juge a deux jours pour statuer (article L521-2 du code de justice administrative). Il permet en cas de succès, la réouverture immédiate de l’établissement.

Pour apprécier l’urgence, la fermeture administrative envisagée doit avoir comme conséquence immédiate et directe de menacer l'équilibre financier de l'établissement demandeur, ce qui est une notion différente de la seule perte de chiffre d'affaires en résultant des charges fixes qu'il doit assumer durant cette période (avec l'obligation de rémunérer ses salariés) et de la perte d'exploitation attendue (CE, 2 novembre 2018, n° 425101).
Un référé-suspension : il permet, en quelques semaines (en moyenne quatre), d’obtenir la suspension de la décision de fermeture en attendant la décision du tribunal administratif saisi parallèlement en annulation de l’arrêté (article L521-1 du code de justice administrative).

Le tribunal administratif de Paris (17 novembre 2022, n°2215283) a suspendu l’arrêté de fermeture administrative d’un mois pour travail dissimulé, disproportionnée eu égard à la proportion limitée des employés concernés sans titre de travail, tous déclarés irrégulièrement payés (13 sur 120), au licenciement par l’employeur dès qu’il a eu connaissance de la situation d’irrégularité des salariés concernés, et au caractère non répété des manquements reprochés. La sanction prononcée entraînerait des conséquences économiques et financières excessives à l’approche des fêtes de Noël.

Quels arguments invoquer ?

Il est possible de contester les motifs, la forme et la procédure suivie par l’autorité.
Par exemple, le préfet d’une commune a, en vertu de l’article 29 du décret du 29 octobre 2020, prononcé la fermeture administrative d’un gîte au motif qu’une soirée organisée antérieurement avait entraîné une propagation de cas de covid-19 et constituait donc une atteinte grave à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publique. Le commerçant a contesté cette décision dès lors qu’elle était motivée que sur des déclarations faisant état d’une rumeur et non d’un PV de gendarmerie ou autre pièce du dossier. Le juge a prononcé l’annulation de l’arrêté de fermeture de 15 jours car l’exploitant démontrait que ce jour-là il n’y avait pas eu de soirée (tribunal administratif de Dijon, Ch 1, 17 novembre 2022).

La décision doit enfin être proportionnée par rapport à la situation de l’exploitant et aux griefs qui lui sont reprochés. Cette appréciation est donc laissée au juge au cas par cas.

Le tribunal administratif de Paris a considéré une fermeture administrative de 5 jours disproportionnée compte-tenu de la nature des faits (rixe provoquée par un client contre un autre en état d’ivresse) et du caractère exceptionnel de la défaillance de l’exploitant, qui n’a eu aucun incident dans l’exploitation de la société (tribunal administratif de Paris, 2 décembre 2022, n° 2224817).

L’arrêté de fermeture administrative doit préciser le degré de nuisance sonore en tenant compte du caractère éventuellement bruyant des lieux en dehors même de l’activité concernée, pour caractériser l’atteinte à la tranquillité publique (CAA Nantes, Civ 1, 6 janvier 2023 n° 21/01954).

Doit-on systématiquement contester l’arrêté de fermeture et peut-on être indemnisé des préjudices financiers subis du fait de la fermeture ?

Il faut peser le pour et le contre avant de vouloir contester un arrêté de fermeture administrative, notamment au regard de sa durée et des pertes de chiffre d’affaires journalières établies au vu des derniers comptes de la société.

Plus la durée de l’arrêté de fermeture sera longue, plus l’établissement subira de pertes financières et plus la contestation de l’arrêté s’avère nécessaire et opportune.

Cependant, même quand la durée de la fermeture imposée est courte, l’arrêté constitue une sorte de ‘casier’ administratif du commerce et l’administration pourra s’en prévaloir à tout moment lorsqu’elle aura à connaître de nouveaux faits à l’encontre de l’établissement.

C’est la raison pour laquelle il faut être très vigilant et ne pas prendre l’arrêté administratif à la légère. Le plus souvent, l’exploitant néglige la phase préalable pour présenter ses observations alors qu’elle est déterminante et peut éviter bien des ennuis.

L’exploitant ne doit pas être découragé car :
- lui et son avocat peuvent empêcher les fermetures administratives en présentant tout d’abord ses observations dans le délai imparti : l’instauration d’un dialogue avec l’administration est fondamental car il peut éviter souvent des fermetures injustifiées ou réduire le délai de fermeture envisagé ;
- même s'il n'a pas pu empêcher totalement la fermeture suite au dialogue avec l’administration, le commerçant pourra, avec l’aide de son avocat, exercer ses recours pour faire annuler l’arrêté de fermeture.

Même si l'arrêté de fermeture a déjà été exécuté, le fait d’en obtenir l’annulation postérieurement permet à l’exploitant de demander à l’État une indemnisation à hauteur de ses préjudices, car il a perdu son chiffre d'affaires pendant toute la durée de l’arrêté, il a payé des salaires, etc.

Ainsi, en cas d’aboutissement de la contestation devant le tribunal, le commerce :
- retrouvera non seulement un casier administratif vierge puisque cette sanction annulée sera considérée comme inexistante, et l’administration ne pourra donc pas s’en servir à l’appui d’une nouvelle sanction ;
- retrouvera son équilibre financier puisque les frais que le commerçant a payé pendant la période de fermeture lui seront remboursés (loyers, charges, salaires…) et ses préjudices financiers également, au titre de la perte d’exploitation et du préjudice lié à l’image.

Un maire peut-il fermer votre commerce ?

Sur délégation de l’État

Le maire peut demander au préfet une délégation de l’État en cas d’atteinte à l’ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publique (art. 3332-15 point 2, alinéa 1). Dans ce cas, il transmet au préfet dans un délai de trois jours les arrêtés de fermeture qu’il prend au nom de l’État. Le préfet peut ordonner la fermeture administrative d’un établissement après des mises en demeure du maire restées sans résultat.

En vertu de son pouvoir de police administrative propre

Le maire a également des compétences en matière de police administrative et peut ordonner sous certaines conditions la fermeture d’un établissement : 
- en infraction avec les règles de sécurité propres à l’activité commerciale des CHR et discothèques visée ; 
- en vertu de ses pouvoirs de police générale (Conseil d’État, 5/3 SSR, du 5 avril 1996).

Le maire peut en effet prendre un arrêté municipal réglementant les zones géographiques concernées par des horaires de fermeture plus restrictives des débits de boissons. Cet arrêté municipal n’est pas une décision individuelle et son respect sera assuré par les agents de police municipale, qui pourront prononcer des sanctions en cas de non-respect de ces horaires.

L’arrêté de fermeture de l'établissement du maire est également contestable devant le préfet (article L2212-1 du code général des collectivités territoriales), devant les juridictions administratives, dans un délai de deux mois.

En tant que mesure de police, l’arrêté doit être motivé par le maire par des troubles à l’ordre public (notion très large) et il doit être motivé et proportionné à la gravité des faits reprochés. Le juge administratif a la possibilité d'annuler un arrêté municipal qui ne serait pas assez motivé (exemple récent : CAA Nantes, 15 mars 2019, n° 17NT02564).

Là aussi, le commerçant pourra obtenir :
- le remboursement de la perte d'exploitation subie pendant la fermeture de l'établissement ordonnée par l’arrêté ;
- le remboursement des charges qu’il a payées pendant cette période de fermeture (salaires, loyers, électricité, marchandises stockées et périmées...) ;
- des dommages-intérêts pour les préjudices : commercial, financier moral et d'image, du fait de l’atteinte à la réputation de l’établissement.

En conclusion, dès le premier contrôle dans votre établissement des services de police, il est donc fortement conseillé de prévenir et d'avoir recours à un avocat spécialiste, car l’arrêté de fermeture peut intervenir très vite, d’autant que l’administration a la faculté de se dispenser de certaines règles en cas d’urgence.

 

Source : l'Hôtellerie restauration

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